Tout commence bien avant l’arrivée. Quitter Port-au-Prince pour rejoindre Thomonde, dans le Plateau-Central, demande du temps, de l’organisation, et une part d’incertitude. Les routes sont longues, parfois impraticables. L’insécurité impose des détours. Il faut partir tôt, rester attentif, s’adapter aux imprévus.
Pourtant, ce chemin fait partie du travail. Il en dit déjà beaucoup sur les conditions dans lesquelles l’aide doit circuler, sur les efforts nécessaires pour atteindre les zones les plus éloignées. Et sur la détermination de celles et ceux qui choisissent, malgré tout, d’y aller.
À leur arrivée, Ermina C et Yanick VP, enquêtrices sociales pour le programme FAES/BID/Zanmi Lasante, s’installent rapidement. Elles sont venues évaluer les situations de vulnérabilité dans la commune. Leur rôle est de repérer les familles qui n’ont plus de ressources, celles qui vivent en marge, souvent invisibles dans les statistiques.
Cette évaluation ne se fait pas derrière un bureau. Il faut aller voir. Entrer dans les maisons. Prendre le temps de parler, d’écouter, de comprendre. Les évaluations suivent un protocole clair, mais elles exigent plus que des questions. Il faut établir un contact, parfois fragile, souvent discret. Dans certaines maisons, ce sont les détails qui complètent les réponses : une marmite rangée depuis la veille, un lit partagé à plusieurs, des médicaments absents. Il faut être rigoureux, mais aussi attentif à ce que les formulaires ne captent pas toujours.
Certaines rencontres marquent plus que d’autres. Comme celle de cette mère seule, avec cinq enfants, sans emploi, sans aucun soutien. Pas même de quoi préparer un repas. Dans ces moments-là, Yanick garde le regard fixé sur son cahier pour retenir les larmes. Mais elle reste concentrée, parce que l’écoute fait partie de l’aide. Et parce que le simple fait de venir peut déjà créer un lien.

Province S, travailleur social du programme, connaît les familles. Son rôle est central : faire circuler l’information, vérifier que les soutiens alimentaires, financiers ou médicaux arrivent aux bonnes personnes, au bon moment.
Le travail se poursuit au centre de santé de Thomonde, où Province, un travailleur social du programme, suit les dossiers identifiés. Il connaît les familles, les parcours, les urgences. Il est en contact direct avec les bénéficiaires, coordonne les aides, répond aux questions. Son rôle est central : faire circuler l’information, vérifier que les soutiens alimentaires, financiers ou médicaux arrivent aux bonnes personnes, au bon moment.
L’infirmière Rose Myriam B. complète l’équipe. Elle intervient pour évaluer l’état de santé des participants au programme. Elle vérifie les traitements en cours, repère les signes d’alerte, oriente vers les services de soins si nécessaire. Son passage est souvent l’un des rares contacts médicaux que certaines familles auront dans les semaines à venir.
À Thomonde, comme ailleurs, la pauvreté est établie, silencieuse. Certaines familles ne mangent qu’un jour sur deux. D’autres vivent isolées, sans route praticable, sans eau potable, sans suivi médical. L’aide sociale ici n’est pas un luxe. C’est parfois la seule chose qui reste.
Pour les enquêtrices, ce travail est exigeant. Il demande de la rigueur, de l’endurance, mais aussi une capacité à rester présente face à des réalités dures. Ce n’est pas un travail que l’on fait à distance. Il faut être là. Écouter. Noter. Revenir. Ce sont de petites choses, mais qui, pour les familles concernées, peuvent faire une grande différence.
À travers leurs visites, leurs observations, leurs recommandations, ces femmes contribuent à rendre visibles ceux qu’on oublie facilement. Leur travail ne transforme pas le pays, mais il répare quelque chose d’essentiel : la reconnaissance, la considération, la possibilité de recevoir un appui sans avoir à tout réclamer.
Chaque visite, chaque dossier, chaque geste compte. Pour que ces équipes puissent continuer à rejoindre les plus isolés et leur offrir un soutien vital, faites un don aujourd’hui.