Solon, debout malgré tout

Un père de famille brisé par le deuil retrouve un semblant de stabilité grâce à l'accompagnement en santé mentale de Zanmi Lasante.

27 mai 2025

Quand Solon Jean Philippe parle de sa vie d’avant, sa voix se fait plus douce. À 61 ans, il garde en mémoire une époque stable, partagée avec sa femme, directrice d’école, et leurs enfants. Agriculteur de formation, il était aussi agent de crédit dans une institution de microfinance. Une vie modeste mais paisible, jusqu’à ce qu’une série de drames bascule tout.

Tout a commencé par une crise d’hypertension. Déjà affaibli, Solon a dû arrêter de travailler. Il commence alors à recevoir des soins pour ses maladies chroniques à l’Hôpital Universitaire de Mirebalais, puis au Centre de Santé Saint-Michel de Boucan Carré, lorsque Zanmi Lasante étend ses services dans la zone.

Mais c’est en 2022 que le choc le plus violent survient. Sa femme, respectée dans la communauté, est attaquée par des membres de sa propre famille à cause d’un différend foncier. Elle décède ce jour-là. Solon, malade, cloué au lit par une crise prostatique, ne peut que recevoir la nouvelle. Son monde s’écroule.

“Je me sentais vide, incapable de penser ou d’agir. C’était comme vivre dans un trou noir.”

Le traumatisme est brutal. Il développe des troubles sévères : perte de mémoire, anxiété, insomnie, isolement profond. L’impact sur ses enfants est tout aussi douloureux. L’un de ses fils montre aujourd’hui des signes de dépression.

Depuis novembre 2022, Solon est suivi par l’équipe santé mentale de Zanmi Lasante. Le psychologue Samuel Thérosme le prend en charge. Ensemble, ils avancent pas à pas.

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« Au début, il y avait de la peur, de la honte, un isolement extrême. Mais petit à petit, grâce à l’écoute et aux soins, il a commencé à remonter la pente », explique le psychologue. Diagnostiqué avec un trouble de stress post-traumatique, une dépression majeure et une anxiété sévère, Solon a bénéficié d’une prise en charge pluridisciplinaire : thérapies, médicaments, accompagnement psychosocial, visites à domicile.

Les défis sont nombreux. Solon vit loin du centre. Il n’a pas de revenu stable. Il n’a pas accès à tous les médicaments, et certains rendez-vous sont impossibles à honorer faute de transport. Mais malgré tout, il revient. Il s’accroche.

Aujourd’hui, il se sent plus stable. Il remercie l’équipe et en particulier le psychologue Thérosme. Il rêve simplement de pouvoir aider ses enfants à terminer leurs études. Son fils est à l’université à Mirebalais, mais l’absence de ressources rend la situation critique.

Solon veut aussi briser le silence. Il parle pour encourager ceux qui souffrent mais n’osent pas demander de l’aide.

“Si vous sentez que vous n’allez pas bien, ne vous cachez pas. Parlez. Cherchez de l’aide. Zanmi Lasante m’a sauvé.”

À Boucan Carré comme ailleurs en Haïti, la santé mentale reste marquée par la stigmatisation. Il n’est pas rare d’entendre : « Kisa moun fou sa ap chèche isit la ? ». Zanmi Lasante travaille sans relâche pour changer cette perception, avec des actions de terrain, de la sensibilisation, et surtout un accompagnement humain, constant et respectueux.

Pour le psychologue Thérosme, l’histoire de Solon est un symbole.

“Nous ne faisons pas que soigner. Nous marchons aux côtés des patients, avec dignité. C’est ça, notre mission.”

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Grâce à vous, Zanmi Lasante peut continuer à offrir un accompagnement humain, gratuit et de qualité à des personnes comme Solon. Faites un don aujourd’hui pour soutenir les soins, former les professionnels et briser le silence qui entoure encore trop souvent la souffrance mentale.