Prendre soin avec rigueur et empathie

Marie Denise Saint-Louis, infirmière et directrice des soins à Boucan-Carré

30 juillet 2025

Dans les montagnes du Centre, à Boucan-Carré, il y a peu de routes praticables mais beaucoup de courage. C’est ici que Marie Denise Saint Louis, infirmière depuis plus de 14 ans, a choisi de servir. Originaire de cette commune, elle connaît les réalités des familles qu’elle soigne. Elle les voit arriver tôt le matin, après des heures de marche, parfois sans avoir mangé, souvent sans comprendre ce qui leur arrive. Pour elle, soigner, c’est d’abord écouter, expliquer et agir rapidement avec les moyens du bord.

Diplômée de l’Université Notre-Dame d’Haïti, elle a commencé à exercer en 2008 au centre de santé Saint-Michel de Boucan-Carré, un site de Zanmi Lasante. Aujourd’hui directrice des soins infirmiers, elle encadre une équipe qu’elle doit former, soutenir et coordonner malgré les défis constants d’un système de santé sous pression.

« Ce qui m’a poussée à devenir infirmière, c’est la volonté d’aider les plus vulnérables. Ici, nous ne pouvons pas faire de distinction selon les moyens des gens. Tous les patients ont droit à la même qualité de soins. »

Parmi les centaines de cas qu’elle a pris en charge, un en particulier reste gravé dans sa mémoire. Une femme est arrivée aux urgences après un accouchement à domicile, en hémorragie. Son état était critique : tension basse, pouls faible, température en chute. Marie Denise a immédiatement installé une voie veineuse, effectué une révision utérine, puis administré les médicaments nécessaires. Le diagnostic : débris placentaires et anémie modérée. Grâce à une prise en charge rapide, la patiente a pu s’en sortir.

« Ce jour-là, j’ai vraiment compris la différence que peut faire une infirmière bien formée, attentive et réactive. C’est ce type d’intervention qui me motive encore aujourd’hui. »

Être infirmière à Boucan-Carré, c’est devoir faire plus avec moins. Le personnel est insuffisant pour assurer les gardes en continu. Le matériel est souvent en quantité limitée. Et dans un contexte où certaines maladies sont encore perçues comme des punitions, convaincre les patients de rester à l’hôpital ou de suivre un traitement relève parfois du défi culturel.

Pour y faire face, Marie Denise mise sur la pédagogie et le dialogue. Elle organise des séances d’éducation à la santé, forme les jeunes infirmiers à la communication empathique, et optimise l’utilisation des rares ressources disponibles entre plusieurs services.

« On ne peut pas changer le système en un jour. Mais on peut renforcer la confiance. Et chaque fois qu’un patient comprend ce qu’il a, c’est déjà une victoire. »

Ce que souhaite Marie Denise pour la communauté de Boucan-Carré, c’est un système de santé qui reflète les besoins réels des habitants. Un système porté par des soignants bien formés, bien traités, qui restent engagés malgré les conditions difficiles. Et surtout, une population mieux informée, capable de distinguer les croyances des réalités médicales.

« La prévention, c’est la clé. J’encourage tous les patients à écouter les professionnels, à ne pas avoir peur des hôpitaux. Quand on comprend ce qu’on a, on peut se soigner. Quand on croit que tout est surnaturel, on s’expose inutilement. »


Former, encadrer et outiller ces femmes et ces hommes, c’est garantir un accès réel aux soins, même dans les zones les plus reculées. Soutenez les soins de santé en Haïti et aidez des soignants comme Marie Denise à continuer leur mission.